A l’heure où le soleil et la lune se côtoient. Lorsque l’horizon est griffé de nuages roses sous un dôme de feu. La vaste immensité du désert évoque l’impermanence de toute chose et la nature dans son plus simple état. Grappillant les quelques mètres qu’il lui reste à franchir, le scorpion tente de se hisser au sommet d’une haute dune. De là haut, il aura une autre vision du monde, les choses ne seront comme en bas. Il se pose donc là, exposant sa cuirasse martelée par les tempêtes de sable, aux dernières vagues de chaleur. Moment de quiétude, apaisement du corps et de l’esprit. Comme toujours il est seul. Il s’est fait à cette idée, mais cela ne l’enchante pas pour autant. Il sait qu’il n’y a pas de fatalité mais juste des sentiers moins arpentés que d ‘autre.
Pendant cette introspection de la part du scorpion, un trou se forma dans le sol pas loin de lui. Tel un siphon, du sable fut aspiré par le fond. C’est alors qu’en sorti un cobra, se dressant dans les airs comme la corde d’un fakir. Gonflant son cou et étalant sa capuche pour paraître plus majestueux, il ondula vers le scorpion. Se plaçant devant lui, il commença à siffloter tout en simulant une reptation aérienne. Le scorpion sorti soudainement de sa torpeur et découvrit le serpent à ses cotés.
« Bonsoir, vile créature ! Lui annonça le scorpion.
- Bonsssoir, malheureux animal. Lui rétorqua le cobra.
- Est-ce la faim ou la curiosité qui t’amène jusqu’ici ?
- Aucun desss deux. Jussste de la sssollicitude enversss une autre persssonne.
- Laisse-moi douter de ta parole, langue perfide, mais ta réputation te précède.
- Ne fonde passs ta pensssée sssur ce que tu entendsss ou ce que tu voisss, maisss fait en l’expérience par toi-même. N’en esss tu passs un exemple jussstement ?
- Sssi... enfin je veux dire, oui. L’apparence non-amicale que peut susciter ma carapace singulière, le tranchant de mes pinces et la menace de mon dard, n’engage pas les autres à venir vers moi. Je leur semble agressif, mais c’est l’inverse qui m’anime.
- Tu te possse trop de quessstion toi. Regarde, moi. Je visss au jour le jour, sssuivant messs enviesss. Je peux être gentil et l’inssstant d’aprèsss t’attaquer. Je visss chaque jour comme étant le dernier sssansss m’encombrer de toutesss cesss interrogationsss.
- C’est peu être plus facile pour toi. Nous n’avons pas la même nature.
- Décidément tu ne veux passs me croire. Je connaisss bien quelqu’un qui sssaura trouver lesss motsss pour te convaincre, maisss il n’essst passs tout proche. Sssouhaitesss-tu que je t’y conduissse ?
- Pourquoi pas. Faisons en l’expérience, souffla le scorpion avant de suivre le cobra à travers le désert. »
C’est quand la lune fut haute dans le ciel et la voie lactée une rivière d’étoiles, que le voyage des deux compères prit fin. Sous le couvert d’un acacia, allongé au pied du tronc, se tenait un puma la tête posée sur les pattes avant. Ce dernier ouvrit les yeux, passa la langue rugueuse sur ses babines et s’étira.
« C’essst lui, affirma le cobra en s’arrêtant à quelques coulée de la bête.
- Tu veux bien m’accompagner ? Lui demanda le scorpion d’une voix chevrotante.
- Sssi cela peut te rassssssurer, je veux bien.
- Bonsoirrr vous deux. Le puma eu à peine le temps de dire, avant que… CLAC CLAC SPIK. »
Le corps du cobra gisait désormais inerte, sectionné en trois parties. Du sang ruisselait encore sur les pinces du scorpion, quand il retira son éperon d’une des pattes du puma. Ce dernier tomba au sol et se mit à convulser sous l’effet du venin qui s’insinuait dans ces veines. Un sournois rictus se dessina alors sur le visage du scorpion.
« Maintenant profitez de ces derniers instants, car il n’y aura pas de demain. »
Sujet: Le scorpion, le cobra et le puma 
Jeu 18 Juin - 20:51
